André
Derain

André Derain, Quatre Baigneuses dans un Paysage, gravure à la pointe sèche

Quatre Baigneuses dans un Paysage

Gilbert 36 ( voir aussi Sawyer, p. 26, et Lee, 38)

gravure à la pointe sèche, vers 1908*, sur simili-japon jaune abricot, le fort rare 1er état (sur deux?**), une belle (et peut-être unique?) épreuve, avec de riches barbes veloutées, et plusieurs irrégularités d'impression à la suite d'essuyage expéditif (e. g. la trace horizontale d'encrage épais au premier plan) qui marquent clairement sa nature d'épreuve de travail, signée au crayon par l'artiste, avec de bonnes marges, deux forts plis de tirage (dont l'un pénètre dans le sujet en haut à droite), quelques courtes déchirures dans la marge supérieure, deux trous d'agrafe en dessous du sujet, quelques maculatures d'encre au verso, autrement en plutôt bonne condition

P. 276 x 198mm., F. 443 x 370mm.

Provenance: la collection de Maurice Gobin, avec le petit timbre MG en bleu au recto (Lugt 1124a)***

Dès 1907-8, dans sa peinture, Derain renonça à la couleur vibrante en faveur de forme structurée, en même temps que ses estampes abandonnèrent l'épais contour fauve pour de riches plages facettées de ton en tailles et contre-tailles, construisant figure et fond comme s'il sculptait directement dans la planche.

La parallèle avec les Demoiselles d'Avignon de Picasso est claire, puisque les deux hommes avaient déjà travaillé ensemble, et en fait à cette époque se rivalisaient.

Cette épreuve de travail exceptionnelle révèle une approche exploratoire, les plans à peine mise en page, comme si Derain s'avançait à tâtonnements sur un terrain inconnu. Il faudrait la comparer à l'état définitif pour se faire une meilleure idée de son progrès.
Cette estampe n'a pas été édité avant 1913, ce qui renforce l'importance de la présente épreuve.


* La datation de cette gravure vient d'Eva Gilbert (voir sa thèse non-publiée de 1985) sur la base de critères stylistiques, et elle est aussi acceptée par E. Pernoud.

**Ces états ne sont pas développés dans les catalogues qui nous sont connus ; il n'y a pas d'épreuves de cette estampe à la Bibliothèque Nationale et Gilbert ne recense que 7 épreuves dans des collections publiques, toutes de l'état définitif. Il faut ajouter que cette épreuve du 1er état est annoté par Maurice Gobin comme une "Epreuve probablement unique."

***Maurice Gobin fut un éminent marchand et connaisseur d'estampes, avec un magasin sur la rue Laffitte jusqu'au début des années 1950. Dans ce contexte il faut noter que les estampes portant son timbre proviennent de sa collection privée, et non pas de son commerce.